jeudi 3 décembre 2015

De l'âge de raison à l'âge de sagesse


L'Âge de Raison

En Occident, la Renaissance, puis les Lumières ont consacré L'Age de Raison qui a mis fin à l'ère Religieuse où la Bible était la seule et unique source de vérité, incontestée et incontestable et où l'Eglise régissait tous les sujets: artistiques, scientifiques, religieux et sociaux.

Depuis lors, les découvertes scientifiques se succèdent et modèlent nos façons de penser, d'agir et d'organiser nos sociétés: la mécanique au temps de Newton, puis la thermodynamique au temps de Boltzmann, la génétique, l'informatique, et plus récemment la biologie et les neurosciences.


Grâce à la science, nous sommes sortis de l'Absolutisme et nous conduisons désormais nos sociétés de manière rationnelle et scientifique.

Malheureusement, dans la poursuite effrénée de rationalité, nous avons parfois l'intuition d'avoir été séparés d'une partie de nous-même: de nos liens avec la nature, de nos liens avec les autres, de nos intuitions, nos émotions, notre spiritualité, notre besoin de transcendance...

Le paradigme scientifique s'est imposé, a donné naissance à la société industrielle et post-industrielle, et a vu triompher le capitalisme et sa dérive néo-libérale.
Le modèle est aujourd'hui contesté et nous restons sans perspectives.

Curieusement, c'est de la science elle-même que proviennent, depuis le vingtième siècle, les plus vives critiques à l'égard de la manière dont nous interprétons ses découvertes.

En effet, c'est au vingtième siècle, que le temps Newtonien, absolu, a cédé la place au temps élastique et relatif d'Einstein.

C'est également au vingtième siècle que la mécanique déterministe de Laplace a cédé la place à l'indétermination quantique, et aux lois de la complexité et du chaos.

A la fin du vingtième siècle, le déterminisme génétique s'efface devant la nouvelle alliance de Prigogine et l'entropie créatrice de Atlan succède à l'entropie décliniste de Boltzmann.

Récemment, le paradigme informatique et computationnel est contesté par la psychologie et les neurosciences (voir aussi  article précédent).

Depuis le début du vingtième siècle, la science et l'épistémologie n'ont cessé de nous rappeler cette vérité: la science est évolutive et son champ d'application est limité. Nous ne devons pas baser l'organisation de la société sur des modèles scientifiques, au mépris de nos valeurs, d'une éthique, et de nos aspirations.

The Next Stage - L'Âge de Sagesse ?

Il est difficile de prévoir l'émergence d'un nouveau stade de développement des sociétés humaines mais certains signes nous permettent de penser que la société est en quête d'un nouveau mode de fonctionnement, qui verra peut-être la fin du paradigme scientifique.

Dans tous les domaines, la science a fait de gros efforts pour délimiter ses propres frontières, mais son éclatante réussite à la fois technologique et sociétale au cours de ces derniers siècles semble avoir occulté ces efforts.
Ainsi, en France, la filière scientifique est devenue la filière d'excellence de l'éducation, au détriment de ce que nos prédécesseurs appelaient les "humanités".
Lorsqu'on conteste cet état de fait, ce n'est pas au bénéfice de la philosophie, de la littérature ou de la psychologie, mais au bénéfice de filières technologiques et professionnelles.

Récemment, c'est pourtant bien de la Psychologie (une science molle par excellence) et des Neurosciences (sciences plus dures et, ce faisant, plus crédibles au regard du paradigme actuel) que proviennent les découvertes les plus incisives envers le Scientifisme Rationnel (1).
On peut citer en vrac: la réhabilitation des émotions contre l'extrême vanité des raisonnements cartésiens, la mise à jour des nombreux biais et illusions cognitives dont nous sommes victimes, l'hypertrophie de notre néocortex, nos simplismes et nos extrapolations, le piège du raisonnement inductif, les biais attentionnels et la rémanence de nos idées.
Pour être exhaustif, on peut se référer aux nombreux articles de la Saison 2 de ce blog.

Ces découvertes constituent, à mon sens, la plus grande critique formulée à l'égard du paradigme scientifique:
En dépit des formidables progrès de la rationalité sur le plan technique, nous ne sommes pas naturellement conçus pour être rationnels dans la vie courante.
La plupart du temps, notre réflexion est biaisée, notre pensée rationnelle est influencée par nos émotions, notre confiance en nous est disproportionnée, nos mécanismes cognitifs sont inadaptés à saisir les grands nombres, les statistiques ou les abstractions scientifiques, et bien souvent, l'ombre de notre ego démesuré occulte la réalité.

Sur Neotopia, Nicolas Quint vient de faire l'éloge du doute et, aux vues des découvertes citées ci-dessus, je ne peux que souscrire à cette philosophie (tout en combattant l'immobilisme qui pourrait résulter d'une telle attitude si elle était mal interprétée).
Le doute, contre toute tentation de simplisme, est une excellente chose.

Ce doute ne doit pas nous paralyser, mais au contraire nous inciter à nous remettre en cause, et à tester nos croyances, plutôt qu'à les théoriser ou à les idéologiser.

Le développement humain, son évolution, comme celle de tout ce qui est vivant, est fait d'expériences, d'erreurs, de remises en cause et de nouvelles expériences.


PS
Sur les conseils d'un ami, j'ai découpé cet article en 2 parties pour améliorer la lisibilité des articles.
Désolé pour les commentaires: certains de commentaires de l'article suivant s'appliquent en fait à celui-ci

2 commentaires:

  1. Petit conseil de lecture à tous les passionnés : "La raison contradictoire, Sciences et philosophie modernes : la pensée du complexe" de Jean-Jacques Wunenburger.
    Je ne sais pas Steph, si tu connais ce philosophe mais dans le cas inverse, je puis t’assurer que tu vas l'adorer... Ce livre est mon livre de chevet... Pour un avant-goût, je vous conseille le visionnage de cette conférence : https://www.youtube.com/watch?v=eTYLaKT0i4U

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