L'entropie créatrice, c'est la flèche du temps, c'est la réconciliation de l'instant passé (mémoire conscience) avec le désir de futur (inconscient auto-organisateur). C'est bien l'affichage en mémoire de "modèles" déjà constitués que nous projetons sur notre environnement ("mappings") qui formerait notre conscience.
C'est cette mémoire qui unit à chaque instant le passé et le présent en projetant sur l'expérience présente des modèles constitués dans le passé.Lorsque nous faisons face à un événement nouveau, une forme nouvelle (un chat roux par exemple), notre cherchons à l'associer à une chose déjà vue: c'est ainsi qu'un chat que nous n'avons jamais vu peut être associé à la catégorie des chats, mais ce nouveau chat jamais-vu va en retour agir sur la catégorie des chats de notre cerveau pour englober cette nouveauté.
Ainsi, lorsque nous vivons une nouvelle expérience, nous projetons 80% de notre mémoire sur notre environnement. L'expérience présente proprement dite (qui est la seule nouveauté susceptible de perturber notre cerveau) ne représente que 20% de nouveauté (et 80% de déjà-vu...)
Ce mécanisme peut expliquer le fonctionnement des "captchas", ces graphiques "bruités" qui représentent des mots déformés (voir ci-dessus) qu'un homme parvient à lire alors qu'un automate ne le peut pas. Ils sont censés pouvoir différencier l'un de l'autre et ainsi déjouer l'assaut d'éventuels hackers.
Les captchas font partie de la famille de tests de Turing imaginé par l'informaticien britannique Alan Turing en 1950. Ce test est un défi d'intelligence artificielle consistant pour une machine à parvenir à tromper un humain par exemple en tenant une conversation sans qu'un homme puisse distinguer s'il a affaire à un homme ou une machine.
L'apprentissage, c'est l'ajustement continu d'un modèle mémoire... Si cet ajustement cesse, si le modèle n'est plus mis à jour, c'est le délire projectif, l'individu perçoit la réalité mais l'ajustement ne se fait plus, ce qui fait qu'il ne peut plus intégrer la nouveauté, c'est à dire plus rien apprendre. Il ne fait plus que projeter ce qu'il a en mémoire.
C'est parce que tout ce que nous voyons est nécessairement nouveau et différent de notre modèle mémoire que nous avons ce sentiment permanent de décalage avec la réalité, un sentiment d'erreur dû à cette "idéalisation".
Mais sans ce décalage, sans ces imperfections, ces erreurs, sans ce "bruit", l'apprentissage ne serait tout simplement pas possible et nous ne serions pas là pour nous poser toutes ces questions...
Il y a quelques années, les neurologues ont découvert que nos souvenirs ne restaient pas intacts dans notre cerveau, mais qu'ils se modifiaient en permanence. Notamment au cours des phases de rêve, les voies empruntées par les impulsions dans le cerveau ne cessent de se réorganiser. Une expérience y trace un chemin qui peut être soit renforcé soit modifié par les expériences vécues après coup.
Longtemps après qu'un événement a été perçu, les "traces" laissées dans le cerveau continuent de se modifier. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, nos souvenirs ne sont pas stables.
Nous avons vu dans ce précédent article qu'au cours de l'apprentissage, ce qui augmente, c'est la différenciation des cellules et ce qui diminue, c'est la redondance.
Lorsqu'on rêve, il semblerait que le cerveau se recharge en redondance et donc en potentiel d'apprentissage: c'est l'oubli qui permet au cerveau de se régénérer en redondance.
Sources:
- Sur les épaules de Darwin - Jean-Claude Ameisen
- Le cristal et la fumée - Henri Atlan
- Pourquoi la tartine tombe toujours du côté du beurre - Richard Robinson
- Les 12 lois du cerveau - John Medina
- Dessin sur l'information
Pas d'article demain. Le prochain dans une semaine (samedi 8 mars). Bon week-end aux presque 500 lecteurs de cet article sur la mémoire.
RépondreSupprimer